Jonas en lutte avec la miséricorde de Dieu (Jonas 4)

 

Notes de prédication

  1. Introduction

Bonjour et bienvenue pour notre dernière prédication sur Jonas.
Eh oui, il en reste une même si le chapitre trois aurait fait une belle fin. Jonas avait commencé par désobéir à Dieu en refusant sa mission, mais Dieu l’avait rattrapé et Jonas avait finalement obéi. Il était allé annoncer le jugement de Dieu à Ninive. Là, sa mission a connu un succès fulgurant. Toute la ville s’est repentie, du plus grand au plus petit, pas d’exception. Face à la repentance de Ninive, Dieu a décidé de faire miséricorde et de ne pas détruire la ville. On pourrait s’attendre à un petit mot de conclusion du genre : Jonas rentra chez lui le cœur joyeux en louant Dieu pour sa grande bonté. Tout est bien qui finit bien, n’est pas ? Jonas voit le fruit extraordinaire de sa prédication. Dieu épargne plus de 120’000 personnes. C’est merveilleux.
Mais voilà que notre ami ne voit pas du tout les choses comme ça. Le livre de Jonas a un quatrième chapitre très instructif. Un chapitre qui nous pose la question : Comment voyons-nous, comment vois-tu la miséricorde de Dieu accordée à tes ennemis ?
Dieu vient d’épargner Ninive, l’ennemi numéro un de Jonas et de son peuple. Voici la réaction du prophète :

  1. Texte : Jonas 4.1-11 (S21)

1 Jonas le prit très mal et fut irrité.
2 Il pria l’Eternel en disant: « Ah! Eternel, n’est-ce pas ce que je disais quand j’étais encore dans mon pays? C’est ce que je voulais éviter en fuyant à Tarsis. En effet, je savais que tu es un Dieu de grâce et de compassion, lent à la colère et riche en bonté, et qui regrettes le mal que tu envoies.
3 Maintenant, Eternel, prends-moi donc la vie, car mourir vaut mieux pour moi que vivre. »
4 L’Eternel répondit: « Fais-tu bien de t’irriter? »
5 Jonas sortit de la ville et s’assit à l’est de la ville. Là il se fit une cabane et s’y tint à l’ombre en attendant de voir ce qui arriverait dans la ville.
6 L’Eternel Dieu fit pousser une plante qui s’éleva au-dessus de Jonas pour donner de l’ombre à sa tête et le délivrer de son mal. Jonas éprouva une grande joie à cause de cette plante, 7mais le lendemain à l’aurore, Dieu fit venir un ver qui la rongea, et la plante sécha.
8 Au lever du soleil, Dieu fit souffler un vent chaud d’est, et le soleil frappa la tête de Jonas au point qu’il tomba en défaillance. Il demanda la mort en disant: « Il vaut mieux pour moi mourir que vivre. »
9 Dieu dit à Jonas: « Fais-tu bien de t’irriter à cause de la plante? » Il répondit: « Je fais bien de m’irriter jusqu’à la mort. »
10 L’Eternel dit: « Tu as pitié de la plante qui ne t’a coûté aucune peine et que tu n’as pas fait pousser, qui est née une nuit et qui a disparu l’autre nuit,11et moi, je n’aurais pas pitié de Ninive, la grande ville, dans laquelle se trouvent plus de 120’000 êtres humains incapables de distinguer leur droite de leur gauche et un grand nombre d’animaux! »

  1. Partie principale

Voilà la fin du livre de Jonas. C’est un des textes les plus surprenants de la Bible. Qu’est qui est en train de se passer ? À ma connaissance, c’est le seul texte biblique où quelqu’un reproche ouvertement à Dieu de faire miséricorde. Normalement, le fait que Dieu soit riche en bonté et lent à la colère suscite la louange et la reconnaissance. C’est là-dessus que le peuple d’Israël s’appuie à chaque fois qu’il reconnait ses fautes et implore le pardon de Dieu. C’est le fondement de son espérance. Dieu est lent à la colère et riche en bonté. Il fait miséricorde à celui qui revient à lui. Il est patient et laisse du temps pour la repentance. Voilà quelque chose de merveilleux. Mais dans notre texte, Jonas balance cela à la figure de Dieu comme si c’était quelque chose d’horrible à éviter à tout prix. En gros, Jonas dit à Dieu : Ce n’est pas ta bonté que je voulais voir, mais ton jugement. Le feu du ciel. La destruction de Ninive. En même temps, je savais bien que ça allait finir comme ça, que le moindre signe de repentance de la part de Ninive allait éveiller ta miséricorde. Super ! C’est pour cela que je ne voulais pas y aller, je sais très bien qui tu es. Mais bon, si c’est comme ça, j’aime autant mourir.
Ce n’est pas le propos le plus mesuré qui soit… Qu’est-ce qui se passe
donc ?

En réalité, ce qui se passe dans ce texte, c’est une confrontation entre deux visions de la justice et de la miséricorde de Dieu. La vision de Jonas et la vision de Dieu lui-même.
Je ne pense pas que Jonas soit fondamentalement opposé à toute manifestation de la miséricorde divine. Au chapitre 2, Jonas loue Dieu pour le salut qu’il lui a accordé. Rappelons-nous, au chapitre 1, Jonas essaie de fuir loin de Dieu en prenant un bateau, mais Dieu fait venir une grande tempête. Le bateau est sur le point de couler avec tout son équipage et pour sauver la vie des marins, Jonas est jeté dans la mer. Normalement, ce serait son arrêt de mort, mais la vie de Jonas est précieuse aux yeux de Dieu. Il ne souhaitait pas sa mort. Alors Dieu envoie un poisson pour avaler Jonas et lui sauve ainsi la vie. Dieu fait preuve de miséricorde envers son prophète désobéissant. Et là, dans le ventre du poisson, Jonas exprime sa reconnaissance pour cette délivrance inattendue. Il n’a aucun problème à être lui-même l’objet de la miséricorde divine. Mais quand il s’agit de Ninive, son regard est bien différent. Jonas ne supporte pas que Dieu fasse miséricorde à cette ville repentante. Pourquoi ? Est-ce qu’il est simplement sadique et qu’il aime voir la destruction d’autres ? En réalité, c’est un petit peu plus compliqué que ça. Ninive n’est pas n’importe quelle ville. C’est la capitale de l’empire assyrien, l’ennemi numéro un de Jonas et de son peuple. D’ailleurs ce même empire assyrien détruira le royaume d’Israël quelques décennies plus tard. Mais pas avant que Dieu ait donné une chance à son peuple de se repentir et que celui-ci ait refusé. Dieu ne traite pas Israël moins bien que Ninive. L’empire assyrien, de son côté, retombera malheureusement dans toute la méchanceté dont il s’est détourné dans notre récit. Et Dieu les jugera pour cela. Ninive sera détruite un peu plus d’un siècle après la prédication de Jonas. Mais au moment de l’histoire de Jonas, Ninive a fait preuve de repentance et Dieu a fait preuve de miséricorde.

Revenons à Jonas. Pourquoi est-il furieux ? La réalité c’est que, Jonas en regardant Ninive voit son ennemi et son seul souhait c’est que Dieu élimine cette menace. Au final, Jonas avait une vision assez égoïste de la miséricorde et de la justice de Dieu. Il voulait bien la miséricorde pour lui-même et pour son peuple, mais pour l’ennemi, il voulait voir le jugement divin. Miséricorde pour lui-même, jugement pour l’ennemi. Et confronté à un Dieu qui manifestement n’agit pas de la sorte, Jonas préfère la mort à la vie. Cette réalité lui semble insupportable.